mardi 21 avril 2015

Eikenott – ITV Prêt-à-manger - Gland - M. Hermann Rawyler - gérant

Chers lecteurs,

Visiblement, les petits commerçants d'Eikenott, attendus pendant longtemps, sont également lésés par le syndrome d'irresponsabilité chronique et manque de réflexion, pas seulement les personnes âgées et à mobilité réduite et mamans à poussettes du quartier. J'ai donc interrogé M. Hermann Rawyler, le gérant du Prêt-à-Manger qui a bien voulu répondre à mes questions :

-       Quelles ont été vos motivations pour prendre la gérance d'un Prêt-à-manger à Eikenott ?

"J'ai une formation de boulanger-pâtissier et suis parti de l'idée que je suis de la génération sans retraite, c'est ce qui m'a motivé à construire ma propre retraite. J'ai eu cette opportunité via mon ancien patron M. Desplanches, qui m'a proposé de devenir franchisé " dans ce complexe."

-       Pourquoi avoir choisi d'être gérant d'une chaîne plutôt que de faire votre propre petite cuisine adaptée à la clientèle locale ?

"Par facilité. Si j'avais ouvert ma propre petite boulangerie, cela signifiait zéro vie sociale, un énorme investissement personnel. Cette opportunité me permet de diminuer certaines contraintes. Je cuis cependant les pains et la petite boulangerie moi-même"

-       Pour quelle raison avez-vous choisi cette chaîne Prêt-à-manger Desplanches ?

"Je travaillais depuis 8 ans chez eux, je connaissais donc les produits, le système par cœur, c'était dans la continuité logique"

-       Cela vous laisse-t-il la possibilité d'ajouter d'autres produits dans le magasin ou pas ?

"Pas vraiment, cela dépend s'il y a des spécialités locales ou pas. Je prends pour exemple un franchisé à Fribourg qui peut proposer des pâtés à ses clients élaborés par une dame locale, qui fait des pâtés très réputés et de très bonne qualité. C'est donc au cas par cas"

-       Pensez-vous que les prix de la gamme sont adaptés au quartier d'Eikenott ?

"Oui et non, car toutes les classes sociales y sont représentées. Les propriétaires PPE eux n'ont aucun problème à venir chez moi, mais les personnes aux plus faibles revenus vont se cantonner au pain ou petites boissons."

-       La recherche d'une arcade a-t-été facile ?

"L'arcade était déjà trouvée dès le début par M.Desplanches qui avait eu vent d'un désir du quartier d'ouvrir une boulangerie-pâtisserie ici. Il a donc reçu une offre".

-       Que représente un tel investissement sur le plan financier et humain ?

"Financier, très conséquent. Remboursement sur une dizaine d'année de CHF  450'000.00, plus le loyer mensuel de l'arcade de CHF 10'000.00 et les charges. J'ai dû en apport personnel investir CHF 80'000.00, le reste relevant d'un prêt bancaire grâce à l'appui du Groupe Desplanches qui a fortement aidé les négociations."

-       Quelles ont été les difficultés que vous avez rencontrées ou rencontrez encore ?

"Sur le plan technique, ce bâtiment Minergie est une horreur. Ce genre de construction n'est pas du tout prévu pour des magasins alimentaires. La demande en énergie, la climatisation, l'aération etc… La régie répond qu'un bâtiment Minergie met 2 à 3 ans pour s'auto-régler. En attendant, je galère clairement sur ces sujets.

Sur le plan de la construction, nous devions ouvrir mi-août 2014, en même temps que la Coop. Le temps de se mettre d'accord avec le propriétaire (Vaudoise assurances), le constructeur (Losinger-Marazzi), l'architecte et les démarches administratives, ont fait que cela n'a pas été possible. On a failli ouvrir mi-décembre, soit 4 mois plus tard, mais le service des Bâtiments de la Commune de Gland a refusé l'autorisation d'ouverture, car une marche et une ventilation ne leur paraissaient pas conformes. Nous avons dû faire revenir l'architecte, l'entreprise de ventilation et les autres intervenants après Noël. J'ai enfin réussi à ouvrir en février, soit six mois plus tard, avec une dérogation spéciale de la Commune limitant à 9 places assises maximum et sans alcool pendant trois mois, le temps d'avoir les autorisations officielles.


C'est un gros manque à gagner pour un boulanger-pâtissier de n'avoir pas pu ouvrir pour Noël.

Un problème de parking se pose aussi. Seule la Coop bénéficie de jetons pour une première heure gratuite. La pharmacie, le Centre médical, et moi-même, n'y avons pas droit. Pour nos client, le parking est payant dès la première minute, ce qui est totalement anti-commerçant et nous pénalise fortement selon les échos que nous avons de notre clientèle. Nous ne demandons pourtant pas la lune, la première heure, de sorte que les malades puissent aller à leurs consultations ou radiologie, que d'autres puissent s'arrêter un moment pour boire un café ou acheter leurs médicaments à la pharmacie.  Nous avons demandé à la régie Comptoir immobilier de faire un geste. Ils nous ont demandé d'attendre l'automne 2015 pour se déterminer, à savoir s'ils vont nous fournir des jetons à moindre prix, car nous devrons les payer pour dépanner nos clients !"

-       J'ai entendu parler d'un gros problème de stores également et eu échos de clients se plaignant de grosse chaleur l'après-midi dans le tea-room ainsi que d'une luminosité aveuglante.

"J'essaie de joindre tous les jours la régie pour ce problème de stores automatiques qui ne fonctionnent pas. C'est une station météo sur le toît du bâtiment qui gère tous les stores du bâtiment. Selon la luminosité ou s'il y a trop de vent, ils sont censés se baisser ou pas. Cela ne fonctionne plus du tout, ils ne se baissent plus la journée mais se baissent la nuit. Des boutons étaient prévus à la base dans la construction pour avoir un contrôle manuel des stores en cas de besoin, mais ils n'ont pas été installés dans mon magasin. La pharmacie, elle, les a eus d'office."

-       Qui devait faire en sorte que vous ayez ces boutons de contrôle ?

"La régie et l'installateur électricien qui les a posés à la pharmacie. J'appelle tous les jours, je laisse des messages et cela me fait très peur pour cet été, les énormes baies vitrées étant en plein soleil tout l'après-midi. Cela génère déjà de gros frais d'électricité, car les frigos pâtisserie et petite restauration tournent à plein régime en continu".


-       Savez-vous que vous perdez des clients à cause de cela ? La chaleur à l'intérieur est ingérable les jours de soleil

"Absolument, j'en ai conscience. Je perds des clients à cause du parking, de la chaleur à l'intérieur du tea-room, de l'absence de terrasse et j'en ai perdu en cause des délais à l'ouverture. Le constructeur et la régie m'ont fait comprendre qu'ils faudrait mettre de la climatisation, mais tous les professionnels du bâtiment qui sont passés dans mon magasin m'ont clairement dit qu'une climatisation dans un tel local aux plafonds très hauts et avec d'énormes baies vitrées qui n'ont pas de filtres anti-UV de ne servirait à rien du tout.

Nous ne sommes qu'au milieu du printemps et la température ce jour était de 32 degrés dans mon magasin. Imaginez quand il fera 30 degrés à l'extérieur en été ! Après Pâques, le peu d'œufs en chocolat qui restaient, ressemblaient à Hiroshima. Ce problème de stores doit être impérativement réglé."

-       Pourquoi la terrasse de quelques tables et chaises que tous les résidents et surtout les personnes âgées et à mobilité réduite du complexe attendaient impatiemment a-t-elle disparu ?

"Il s'agit d'un malentendu entre la Commune et moi, j'avais compris qu'il y avait une mise à l'épreuve de 30 jours afin de savoir s'il n'y avait d'opposition à l'ouverture dans le quartier. Les 30 jours écoulés, j'ai cru y avoir droit. Ensuite, cette limitation de nombre de chaises reste valable pendant plusieurs mois jusqu'à ce que la Police du Commerce donne son feu vert. J'ai donc dû retirer la petite terrasse qui n'est restée là qu'une semaine."

-       A quel moment les résidents d'Eikenott, surtout les personnes âgées qui n'ont aucun espace de rencontre possible depuis un an et visiteurs peuvent-ils espérer boire un café au soleil ?

"J'espère, fin mai"

-       Combien d'employés avez-vous actuellement ?

"Deux employés à 50 % chacun. La vendeuse réside dans le quartier, elle apprécie de pouvoir faire de temps en temps la fermeture, cela me permet de faire les différentes démarches administratives, banque, Commune, etc… pendant les heures d'ouverture de bureau ou de faire ma comptabilité sur place. Le second employé est assistant-manager et travaille à 50 % ici et à 50 % sur Genève."

-       Arrivez-vous à assumer financièrement ? Si non, quand pensez-vous pouvoir le faire ?

"En ce moment je ne tourne pas du tout financièrement. Je réalise trois fois moins que le minimum requis, je tourne totalement dans le rouge, raison pour laquelle j'attends impatiemment l'autorisation pour la terrasse qui génère une augmentation de la clientèle et rend la visibilité pour les promeneurs plus évidente, car le dimanche par exemple, personne ne voit que c'est ouvert.

Pour l'instant, il m'est impossible de me verser un salaire, je suis donc en retard dans le paiement de mon loyer personnel et autres frais, ainsi que dans celui de l'arcade.

Je pense qu'il faudra au moins deux ans pour arriver à tourner correctement."

-       Si c'était à refaire, le referiez-vous ?

"Oui, qui ne tente rien n'a rien. Je savais dès le départ par l'expérience de mes pairs, que ce serait très difficile au début. Je garde le sourire, le moral. Ce ne sont pas les problèmes à répétition qui vont m'arrêter. Tant que je ne suis pas dos au mur, je continue."



-       Bravo M. Rawyler. Vous êtes courageux, travailleur, optimiste.

"Comme je le disais au départ, je suis de la génération des futurs sans retraite. Si on ne tente pas tout au départ, on n'aura rien. Nous devons nous occuper de nous, nous-mêmes. Il est clair que les petits commerçants sont peu aidés dans ce pays. Si cela ne fonctionne pas ici, je recommencerai ailleurs. La Terre est vaste."

-       Etes-vous membre de l'Association Commerciale de Gland? ACG

"Non, j'ignorai que cela existait, mais maintenant que je le sais, vais me renseigner. A plusieurs, on est toujours plus forts."


-       Merci M. Rawyler de m'avoir accordé cet instant et de votre franchise.

 * * *

Et pour couronner le tout, une image de la porte d'entrée de l'immeuble "commercial", en panne, une fois de plus ce jour, refusant de s'ouvrir et se fermer :
 Et l'entrée et sortie obligatoire par la sortie de secours :
Espérons qu'aucun malvoyant n'aura dû sortir par là.

A bientôt pour la suite

Le Tigre


4 commentaires:

  1. Dure dure la vie d'indépendant et s' agissant d'un franchisé c'est encore plus difficile. Son manque à gagner du fait des incompétences notoires est gravissime.

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    1. Le trouve bien courageux ce jeune homme. Voire téméraire. Ce qu'il aurait fallu faire ici, c'est un grand centre commercial avec un peu tout, un parking adéquat, etc... Cela aurait permis aux citoyens de Gland de venir s'approvisionner en chaussures, vêtements, objets pour la maison, boucherie, poissonnerie, tout ce qui manque ici au lieu de les obliger à prendre leur voiture pour aller à Nyon et pour les personnes âgées de devoir payer des transports accompagnés très onéreux pour s'acheter un slip ou un pyjama. Rien ne fonctionne, pour personne, ni les locataires, ni les petits propriétaires PPE, ni les commerçants. Le Centre médical qui a une radiologie n'est pas accessible aux scooters élecriques, une personne qui aurait une jambe plâtrée à l'horizontale en fauteuil ne pourrait pas monter, la petite Coop qui était au centre du village et venue s'installer ici est encore plus petite, la pharmacie n'a qu'un seul fournisseur imposé ce qui rend impossible la commande de certains médicaments, le bancomat est trop haut et pas accessible en fauteuil... ils étaient 15 à le mettre en place ! Et sur 15 personnes il n'y en a pas un qui a réfléchi.

      Et en plus le parking est payant sauf pour la Coop. Une personne qui vient amener tous les 2 jours un malade en fauteuil pour quelques soins rapides au Centre médical doit payer dès la première seconde.

      A mon avis tous ces petits commerçants vont bientôt être sur la paille. Les loyers sont très élevés ici et pas du tout en adéquation avec ce qui est proposé et encore moins ce qui a été promis, excepté ceux de l'immeuble protégé et celui subventionné qui ne représentent qu'une toute petite partie du complexe.

      On appelle cela des faiseurs de pauvres.

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  3. Désolée Mme Deshant mais ce blog n'a pas pour but de faire l'intermédiaire entre prêteurs et emprunteurs ;)

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